TTIP, je t'aime pas non plus




Dans mon blogpost précédent je vous ai déjà parlé du libéralisme et ses perversions. Aujourd’hui j’ai envie de vous parler du TTIP, du traité transatlantique entre l’Union européenne et les Etats-Unis. C’est la prochaine étape de la mondialisation.

Economiquement gagnant mais…

Le TTIP créera une grande zone de libre-échange entre l’Union européenne et les Etats-Unis. Les barrières commerciales entre les deux pays disparaîtront et des biens et des services vont être vendus à moindre prix dans les deux zones. Les coûts de production diminueront encore grâce à la spécialisation des entreprises. Il n’y aura pas seulement des spécialisations à l’intérieur des entreprises mais aussi dans la région. Les mêmes entreprises vont être proches l’une de l’autre comme dans la Silicon Valley. Économiquement c’est génial. Économiquement oui mais…  

Mais de l’autre côté il y aura trois grands perdants : l’Europe, le petit producteur et la planète. Commençons par l’Europe. L’Europe heureusement a (encore) des normes environnementales et sociales. Les entreprises ne peuvent pas polluer comme elles veulent et elles doivent payer les cotisations sociales. Ces normes environnementales sont beaucoup plus souples et il n’y a pas de sécurité sociale aux Etats-Unis et donc on verra beaucoup d’entreprises partir là-bas comme elles peuvent produire plus pour moins. Cela ne coûte pas plus cher d’exporter comme il n’aura plus de taxes douanières et le prix de transport est (beaucoup trop(?)) bas. Oui, une zone de libre-échange crée des emplois mais elle les déplace. Et pour les déplacer, il faut les détruire quelque part d’autres. N’oublions pas. L’économie gagne quand les gagnants gagnent plus de ce que les perdants perdent. Ce n’est pas magnifique ?

Le petit producteur qui crée un bon petit fromage dans sa campagne française perdra aussi. Non seulement parce qu’il ne saura pas faire face aux coûts de production mais aussi parce que le prix qu’on lui donnera sera négligeable. Le coût du petit producteur est haut comme il essaie de faire de la qualité. Il n’essaie pas de produire en masse et n’a donc pas de grandes installations. Il ne bénéficie pas d’économies d’échelles. Il veut un bon petit produit. Il est fier de son produit. Malheureusement notre petit producteur recevra un prix négligeable. Le prix du marché diminuera tellement à cause de la submersion de nouveaux produits. Le consommateur choisira évidemment toujours le produit le moins cher. Comme le serpent qui mord sa propre queue. Notre petit producteur devra fermer boutique. C’est la crise. Vive la crise ! Ou pas. A côté de ça il y a les AOP. Les appellations d'origine protégée. Comme dirait Wikipedia : ce label protège « la dénomination d'un produit dont la production, la transformation et l'élaboration doivent avoir lieu dans une aire géographique déterminée avec un savoir-faire reconnu et constaté ». Quand on produit un produit dans une certaine région on peut l’appeler avec le nom de la région. C’est un label de qualité et il limite la fausse production. Mais voilà le petit coco est en danger. Les États-Unis n’en veulent plus. Ils veulent qu’on puisse produire un Bourgogne en Californie et produire du salami d’Ardenne au Texas. Mais oui pourquoi pas ? On perd tous nos repères de qualité.

Jusqu’à présent je n’ai que parlé d’emplois et de libéralisme économique. Et vous pouvez-vous dire que je suis complètement con et que je ne m’y connais pas et blablabla. C’est peut-être ou sûrement vrai mais je voudrais juste pointer cette étude-ci de Jeronim Capaldo. Elle prédit 600 000 pertes d’emplois, une nette diminution de l’exportation européenne, une diminution de la croissance économique et une diminution du prix des salaires.

La planète en troisième lieu perdra aussi. Les consommateurs pourront consommer encore plus. Les entreprises devront donc encore plus produire et encore plus utiliser les réserves naturelles de la planète. Détruire une forêt ne coûte rien. C’est à l’Etat de nous protéger contre la déforestation. La planète perd toujours parce qu’elle n’a pas de prix. Elle n’a pas de valeur marchande et donc sa valeur est zéro. On ne la prend pas en compte dans les modèles économiques. C’est dommage mis pas grave n’est-ce pas ? On a tous les biens et services que l’on veut ! On est riche ! On est heureux.

On veut créer cette zone pour relancer l’économie mondiale, pour avoir une plus grande économie et pour créer des emplois. Mais nous arrivons à un point où les citoyens ne peuvent plus consommer encore et encore pour avoir chaque année un plus grand taux de croissance. La dette souveraine et la dette des entreprises et des ménages sont déjà tellement élevées. Nous devons repenser notre système capitaliste. Nous devons penser à un système qui promeut la qualité et pas la quantité. Certes, c’est un enjeu de longue haleine.

Les grandes entreprises (les vrais leaders de ce monde) gagneront encore une plus grande part de marché et elles pourront encore plus grandir et gagner plus de thunes. Elles gagneront encore plus de pouvoir. Mais est-ce vraiment bon pour la société et pour les gens ?

Est-on arrivé à ce point où la croissance doit un peu diminuer pour mieux vivre ? La croissance éternelle est un grand mythe économique.

Changer la mentalité du consommateur est aussi un défi du 21ième siècle. Les biens les moins chers ne sont pas toujours les plus durables. Un prix bas veut dire beaucoup. Cela veut dire que les salaires sont bas, cela veut dire qu’on n’a pas beaucoup de contrainte qu’elles soient environnementales ou sociales.

Est-on aussi arrivé un point où l’on a trop ? On peut tout avoir. Je l’avais déjà expliqué dans mon article précédent. On a des fruits toute l’année. On a le choix entre 36 000 marques et types de produits. Est-ce vraiment nécessaire ?

La grande puissance les Etats-Unis

On dit souvent qu’une image vaut plus que milles mots. Alors regardez cette image.


Les Etats-Unis, je ne sais pas pourquoi mais ils veulent toujours et encore le pouvoir. Ils veulent se mêler de tout et ils veulent diriger tout le monde. Ils ont eu le pouvoir pendant les années précédentes et ils ont mené la guerre au Moyen-Orient. On en voit le résultat. Le terrorisme n’a jamais été aussi grand. Le groupe terroriste ‘Etat Islamique’ n’a jamais été aussi riche. La haine contre l’Occident n’a jamais été aussi grande. Avec leur bien-pensance et leurs valeurs qu’ils estiment supérieurs à celles des autres ils ont essayé d’instaurer une belle petite démocratie. Il faut dire qu’après l’invasion de l’Irak le système était corrompu plus que jamais.

Alors voilà. Frankenstein est de retour. Ils veulent instaurer un nouveau diktat. Ils veulent être les maîtres du jeu. Le joueur va jouer l’arbitre. Donc, les. Etats-Unis ne veulent pas seulement vendre et devenir encore plus riches, mais ils veulent aussi dicter les règles et les normes du commerce. Ici, en Europe, nous avons encore un peu d’éthiques et nous ne jouons pas encore à Dieu en change l’ADN des choses. Les OGM ne sont pas encore acceptés en Europe. Mais voilà si les Amériques dictent les règles, l’Europe devra s’incliner devant les OGM, les poulets chlorés, la viande avec des hormones. J’entends souvent l’argument dire que l’Europe n’acceptera jamais cela. Or ce n’est pas vrai les groupes de pression américains sont très forts. L’Europe en partie a déjà accepté les OGM dans ce traité. Et demain on perdra nos acquis européens en matière de normes environnementales et sociales.

L’Europe a mis tellement d’efforts dans la traçabilité des produits. On peut vraiment dire d’où vient un produit. Et dire que nous pourrions perdre tout cela ? N’oublions pas que l’Europe interdit 82 pesticides qui sont utilisés aux Etats-Unis. 90% de leur soja et de leur coton est génétiquement modifié. Non je n’en veux pas. Mais est-ce-que j’ai vraiment le choix ?

Le TTIP aussi pour enjeu de pourvoir plus de puissance aux Etats-Unis. Leur ultime but est que le TTIP devienne un équivalant à l’OTAN. Donc déjà premièrement on devient encore plus hostile aux Russes. Alors qu’on les a besoin de temps en temps. Aussi on augmentera notre dépendance aux Etats-Unis. Qui dit que demain nous pourrons plus acheter notre pétrole et notre gaz aux Russes ? Vous savez, la guerre froide, elle revient toujours. Suffit de voir, ce qui s’est passé avec l’Ukraine. A-t-on vraiment le droit de s’isoler plus de la Russie ? Une grande partie de nos produits partait vers la Russie avant que l'on avait ces bêtes sanctions. Premièrement, c’est un marché d’exportation. Deuxièmement la Russie est aussi une grande puissance mondiale. Et on n’est pas obligé de choisir son camp. On pourrait même travailler ensemble avec la Russie et les. Etats-Unis pour éradiquer le groupe terroriste ‘Etat Islamique’.

Démocratiquement perdant

On en parle souvent mais je trouve que c’est important de le mentionner. Il y aura des tribunaux privés auxquels les entreprises pourront se plaindre si elles n’arrivent pas à vendre un certain produit dans un état-membre. Les grandes entreprises gagneront encore plus de pouvoir. Mais oui pourquoi pas tant qu’on y est ? Ce sont encore les entreprises contre les citoyens. Le citoyen lui par contre n’a pas de pouvoir. Il ne peut pas se protéger. Il subit.

Je voudrais être concret ici parce que tout cela parait vague et encore ici je veux reprendre les arguments que tout le monde connaît. Philip Morris pourrait attaquer des états-membres parce qu’ils prennent des mesures répressives contre le tabac. Une entreprise énergétique pourrait attaquer l’Allemagne parce qu’elle n’en veut plus du nucléaire.

Nos grands leaders politiques adorent parler de démocratie et de droits de l’homme mais quand il s’agit d’agrandir encore leur pouvoir on les entend plus. Comme une grande partie des citoyens je suis contre le TTIP mais je ne pourrai pas voter. Je ne pourrai pas voter contre. Je n’ai rien demandé et on m’impose de nouvelles règles, on m’impose ce traité. Certes, j’ai pu voter le 25 mai 2014 pour les élections européennes. Mais soyons sérieux et appelons un chat un chat. J’ai pu voter pour quelques ploucs qui gueuleront dans le parlement européen avec 751 d’autres ploucs. En plus, on sait très bien que le parlement n’a pratiquement rien à dire. C’est la Commission qui prend les décisions. Une commission non démocratique avec des politiciens qui n’ont pas gagné les élections dans leur propre pays. Et ce sont eux qui vont maintenant un peu diriger le monde.

Un autre argument que j’entends souvent est le suivant : nous ne pouvons pas parler, ni même discuter à propos du TTIP parce que nous n’y comprenons rien. C’est peut-être vrai et évidemment que nous ne connaissons pas tous les détails. Mais si nous ne pouvons pas en discuter où est la démocratie. Et si nous ne le comprenons pas est-ce que les grands de ce monde en comprennent quelque chose ?

Je voudrais terminer ce blogpost par une citation qui vient d’une chanson de Nekfeu qui résume très bien la situation.

« Ceux qui ont pris tout le plat dans leur assiette
Laissant les assiettes des autres vides et qui, ayant tout
Disent, avec une bonne figure, une bonne conscience "Nous, nous qui avons tout, on est pour la paix !"
Tu sais c'que j'dois leur crier, à ceux-là ?
"Les premiers violents, les provocateurs de toute violence, c'est vous ! Et quand, le soir, dans vos belles maisons, vous allez embrasser vos p'tits enfants, avec votre bonne conscience, au regard de Dieu, vous avez probablement plus de sang sur vos mains d'inconscients que n'en aura jamais le désespéré qui a pris des armes pour essayer de sortir de son désespoir."»


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