La difficile question des droits de l'Homme
Aujourd’hui je vais me mettre mes skis et
m’avancer sur un terrain très glissant et très vague : les droits de
l’Homme d’après La Déclaration universelle des droits de l'homme des Nations
Unies. Elle a pris la place de Dieu et l’autorité essaie de s’y référer. Je
commencerai par expliquer ce qui est l’autorité pour ensuite passer à la Déclaration.
Ensuite je parlerai des problèmes et je poserai la question s’il faut mettre
entre parenthèses les traités pour les sauver. Je terminerai avec une petite
conclusion.
L’autorité : Dieu et l’Humanité
L’autorité est un concept très difficile
expliquer parce qu’on pourrait le confondre avec le pouvoir et la persuasion.
Je vais me baser sur le concept d’Arendt[1]
de « Qu’est-ce que l’autorité ? » et même là on ne trouve pas
vraiment de définition claire. D’une part elle n’est pas le pouvoir parce que celle-là
se trouve dans les mains du peuple qui peuvent élire des politiques qui se
présenteront au parlement pour former un gouvernement. Ce dernier sera le pouvoir législatif et exécutif qui gouverne « au nom du peuple ».
Elle n’est pas persuasion parce qu’il faudrait alors convaincre le peuple à base
d’argumentation. On pourra alors croire qu’elle est violence ou tyrannie comme
là il ne faut pas convaincre. Or dans ce cas, on fait obéir le peuple avec la terreur. Mais
donc on peut dire ce qui n’est pas l’autorité mais ce qu’elle est c’est déjà
plus difficile.
On peut dire qu’avant que Dieu soit tué par
Nietzsche et qu'avant la Modernité, l’autorité c’était Dieu. Il n’y avait pas de
séparation entre l’Eglise et l’Etat. Le gouvernement ou le pouvoir législatif
invoque l’existence de Dieu pour écrire ses lois et pour faire obéir le peuple. Toute la société
s’était fondée sur cette existence. La religion était la base de la morale, de
la séparation entre le Bien et le Mal ; elle était la base de ce qu’il
fallait faire. Il n’y avait pas de persuasion, il y avait la foi ; il n’y
avait pas de violence, les citoyens affirmaient son existence.
Dans la société Moderne, la croyance en Dieu n’est plus qu’un principe, n’est plus qu’une liberté individuelle. En même temps que Dieu meurt, l’autorité meurt aussi. Le problème c’est que sans autorité il n’y a plus d’ordre non plus.
Le désordre n’est pas souhaitable ;
toute situation de crise est le terreau de l’injustice. Dans une guerre civile
de désordre règne. Tout est alors possible, il y a des meurtres et des
pillages. Il n’y a pas de stabilité, le
pouvoir ou l’ordre législatif ne cesse changer de même ; elle passe de
tyrannie en tyrannie. Hobbes décrit aussi le concept de deux hommes qui veulent
la même chose. Pour arriver à cette fin, ils deviennent ennemis et il n’y a
personne au-dessus d’eux pour
rétablir le respect, il n’y a personne pour assurer la sécurité des autres
personnes. « Il apparait clairement par là qu’aussi longtemps que les
hommes vivent sans un pouvoir commun qui les tienne tous en respect, ils sont
dans cette condition qui se nomme guerre et cette guerre de chacun pour
soi ». Hobbes utilise le mot ‘pouvoir’ ici, j’aurais préféré le remplacer
par ‘autorité’. Maintenant, tout cela dépend de l’écrivain, du penseur comme il
définit le concept pour lui-même et pour ses lecteurs. Pour avoir de l’ordre il
a donc fallu trouver un substitut à Dieu.
La société Moderne a fondé son autorité sur
les droits de l’Homme. Nous avons de nouveau trois niveaux : le peuple, le
gouvernement et la Déclaration universelle des droits de l’homme. On reconnait
ici que chaque homme a des droits qu’un pouvoir (législatif ou exécutif) ne
peut transgresser. C’est une référence philosophique. On fait comme si cette
déclaration vient de Dieu et on base notre autorité là-dessus. Il n’y a ni
persuasion ni violence.
La destruction de l’Etat pour le reconstruire après
En basant notre autorité là-dessus, nos
états, nos élites ont proclamé la mort de la nation. Au nom des droits de
l’homme, notre nation à nous était mauvaise, méchante, oppressante, infecte, colonisatrice.
Voyez-vous nous sommes tous coupables de l’extermination des juifs ; nous
sommes tous coupables des centaines de milliers de mort en Indochine ;
nous sommes tous coupables de la maltraite et de l’esclavagisme de noirs. Je vais
évoquer les problèmes suivants : le relativisme culturel, l’enterrement de des propres instituons, notre obsession à être les grands sauveurs des peuples
opprimés et le tête à tête de l’état avec un individu.
Avec cette déclaration nous tombons dans le
relativisme culturel ce qui consiste à dire qu’on ne peut juger aucune culture,
qu’on ne peut condamner aucun acte parce que c’est leur culture et que c’est la tradition. L’Europe, l’utopie idéale
des droits de l’homme accepte par ce concept philosophique des centaines de
milliers d’immigrés venu des quatre coins du monde. Le concept d’assimilation
est depuis longtemps oublié, cette procédure pour devenir un citoyen d’un état,
c’est-à-dire le processus dans lequel un immigré, un nouveau-né ou un individu
tout court accepte les valeurs et reconnait le pouvoir de l’Etat. Au nom des
droits de l’homme, on est parvenu à oublier ce concept d’assimilation. La
diversité de cultures, la diversité de religion est la plus belle chose qui
puisse nous arriver. On donne toujours plus de droits à un groupe d’individu, à
une communauté au nom de la culture et de la liberté individuelle. Mais si
cette liberté individuelle menait au désordre et à la tyrannie des
minorités ? Ces droits, on les donne pour respecter les droits des autres.
Un citoyen d’un Etat-Nation représente sa nation
tous les jours. Elle reconnait le pouvoir et peut le changer avec les
élections. Avec la Déclaration un citoyen peut attaquer son propre état devant une cour étrangère, la Cour européenne des droits de l'homme. Quand un citoyen a
épuisé toutes les cours dans son propre pays et s’il trouve qu’on a violé ses
droits il peut juger son pays, sa nation devant la cour européenne, ce qui est
complètement loufoque. Elle reconnaît donc que sa nation et ses institutions ne sont plus les plus importantes.
On veut être combattant partout pour les peuples opprimés. C’est pour cela qu’on se voit le droit – parce que nous sommes mieux, nous aimons la démocratie, nous ne voulons pas de peuples opprimés, nous sommes tous des frères et nous voulons tous être libre – de déstabiliser des pays entiers au nom des droits de l’Homme. C’est pour cela que les Etats-Unis ont envahi l’Irak pour instaurer la démocratie et c’est pour cela que Bernard Henry Levy est allé dans les pays arabes pour libérer ces peuples. On en voit le résultat. Nos états sont amoureux des peuples du Sud. C’est pour cela que les politiques organisent des expositions avec une succession de tableaux qui avaient l’ambition de montrer la planète dans sa diversité. L’Histoire de l’Etat-Nation ne compte plus comme la nation est devenue un méchant oppresseur. Les grandes puissances du 19ième siècle c’est les colonisations, c’est l’esclavagisme, c’est les enfants travailleurs. Ce n’est pas beau tout ça. A côté de cela il y a une concurrence de victimisation. Chaque peuple, chaque communauté, chaque être veut son jour de commémoration, sa statue, ses financements, ses discours. Le lobby juif est très puissant. Ils arrivent à avoir plusieurs dates, plusieurs lieux et arrive à transformer des victimes en bourreaux. Hollande à peine élu avait osé dire : « le crime commis en France par la France » en parlant de l’extermination des juifs. Il n’y avait plus que la Vel d’Hiv qui comptait, Eichmann et Hitler n’y étaient pour rien. N’oublions pas que chacun essaie de défendre ses intérêts. Chaque nation et chaque civilisation veut défendre des concepts philosophiques, ses racines et son Histoire.
La Modernité est devenue un tête-à-tête
entre l’Etat et un individu. Certains ont plus de droits que d’autres. L’Etat a
conçu un état dans l’Etat et elle essaie que chaque individu à tout ce qu’il
faut. Non seulement sur base électoraliste mais aussi pour pardonner ce le
méchant pays a fait auparavant. On essaie donc d’introduire tous les droits
imaginables. Personne n’a le courage ni le recul de dire comme Mirabeau a son
époque qu’aucun des rédacteurs de la Déclaration des droits de l’homme et du
citoyen (1791) « n’avait pensé à déclarer les droits des Cafres ni ceux des
Esquimaux, pas même ceux des Danois ni des Russes ».
Mettre entre parenthèses
Ce que M. Kerkhofs explique dans son
blogspot[2]
c’est le fait qu’on trop souvent on oublie que les droits de l’Homme ce n’est
pas simplement une utopie philosophique mais c’est que c’est aussi écrit dans
plusieurs traités internationaux. C’est tout-à-fait vrai, au moment de la mort
de Dieu il a fallu remplacer ce concept par quelque chose d’autre. Deuxièmement,
après toutes les guerres il fallait retrouver la paix donc nos élites se sont
dit :« Plus jamais ça » et ont fait des lois au niveau
international. Et en effet, celui qui essaierait aujourd’hui de mettre en doute
ces traités seraient complètement fous et se suiciderait politiquement. La
Modernité le combattra jusqu’à sa mort alors que dans le temps, de nombreuses
personnes comme Mirabeau et Bentham ont plusieurs fois critiqué des traités
similaires.
Ce que M. Kerkhofs essaie de savoir s’il
faudrait mettre entre parenthèse ces traités pour les soigner. On peut, dit-il
diminuer les dépenses sociales pour sauver la sécurité sociale. Aujourd’hui en
Europe, plusieurs milliers de réfugiés arrive tous les jours sur nos plages.
Aujourd’hui au Liban, les réfugiés sont plus d’un tiers de la population libanaise.
Est-ce que pour ces raisons-là qu’il faudrait mettre les droits de l’Homme entre parenthèses
?
Il est vrai que tout le monde, chaque
individu a le droit de vivre ; qu’il ne soit ni dans une zone conflictuelle ni
dans une guerre. On peut dire que chaque
citoyen a le droit de recommencer une nouvelle vie sur un autre territoire,
dans un autre pays où il sera en sécurité. Mais faut-il offrir plus qu’une protection ?
Faut-il accorder plus de droits ? Les nouveaux arrivants ont-ils aussi des
obligations ? Et le pays accueillant doit-il modifier ses valeurs et son
mode de vie ?
Tous les jours des réfugiés arrivent sur
nos plages européennes. En les acceptant l’Europe offre un bout de terrain ;
un bout de son territoire à des gens qui n’ont rien à voir avec l’Europe
auparavant. Faudrait-t-il aller plus loin et leur offrir une protection ?
Faudrait-il protéger les femmes et les enfants contre le trafic humain ?
Faudrait-il protéger les hommes d’une communauté contre une autre communauté ?
Le trafic humain est dégoutant et que des gens se fassent tuer pour leur mécréance,
pour leur religion, pour leur nationalité est tout-à-fait effroyable, ne
mettons pas cela en doute. Ce que j’essaie d’écrire ici si c’est notre devoir
(même si le mot ‘devoir’ ne veut absolument rien dire) de protéger ces gens ?
Mais est-il vraiment possible d’offrir une protection à tous ces gens ? Au
fait la question n’est pas là. On se demandait si on un Etat devrait le faire. Une
protection pour chaque individu c’est une utopie. Mais pourquoi protégerait-on
les gens venus sur le territoire et pas les gens restés dans la zone de guerre ?
Mais en accueillant ces personnes est-ce qu’une
nation ne se met-elle pas elle-même en danger ? Des gens se font tuer pour
leur religion, mécréance, etc comme on vient de le dire. Comment assurer la
protection des citoyens d’origine, des
personnes déjà vivantes sur le territoire ? En déplaçant la guerre d’un
endroit à l’autre, on viole les droits de l’Homme des personnes qui vivent déjà
sur le territoire. Est-ce qu’un état doit alors protéger non seulement ses
citoyens et les nouveaux arrivants ?
D’une part, il y a donc la protection des
citoyens déjà sur le territoire et d’autre part il y a le relativisme culturel.
Au nom de celui-là nous avons tué le concept d’assimilation et d’intégration.
Il n’y a plus de processus pour devenir citoyen d’une nation, comme il dirait
en France : il n’y a plus le pacte républicain. Qu'est-ce qu'une nation ?
publiait Ernest Renan en 1882. C’est la volonté de perpétuer le présent et l’héritage
du passé. Cela veut dire reconnaitre notre Histoire même si elle est noire.
Reconnaître que nous étions une grande nation et pas seulement des bourreaux.
Il faut tout remettre dans son contexte. D’une part la nation ne doit pas
modifier son Histoire au nom des nouveaux arrivants. Mais d’une autre part les
nouveau doivent accepter l’héritage. Il accepte de faire partie de cette
nation.
Cela voudrait dire qu’il faudrait accorder
avec le processus d’assimilation les mêmes droits à chaque citoyen. A quoi
servirait l’assimilation et l’intégration alors ? Chaque individu une fois
fini le processus d’assimilation fait partie de la nation et devient citoyen
comme tout le monde. La Loi Pleven (1972) avait donc raison d’ajouter la
provocation à la discrimination, à la haine, ou à la violence au code pénal au
même niveau que d’autres crimes comme le vol, pillage et incendie ? Le
fait de discriminer un citoyen à l’autre juste pour son origine de base est
contraire aux valeurs de la nation.
Mais du moment qu’une certaine communauté
ou un certain groupe demande de nouveaux droits au nom de leur religion ou au
nom de leur culture est alors contraire au processus d’assimilation. Chaque
citoyen est égal et chaque citoyen partage une seule culture : la nation
et le pays. On accepte les valeurs du passé et l’héritage.
Faut-il donc mettre les traités entre parenthèses
pour les sauver ? Ou faut-il les mettre entre parenthèses pour sauver la
nation ? Ou des droits universels pour tout le monde c’est juste une
utopie et agissons au cas par cas parce que personne ne changera le monde mais
on peut changer le monde de quelqu’un ?
Conclusion
La Modernité a remplacé Dieu par l’Homme
et ses droits. En soit, il n’y a rien du mal. Il faut trouver une autorité, il
faut se trouver un Dieu ou une utopie. Ce qui est plus grave c’est au nom de l’Homme
on veut faire la morale aux citoyens et on veut – tout comme dans le
Christianisme, ce que Nietzsche commandait – qu’ils se flagellent et disent qu’ils
sont les mauvais. L’homme redevient bourreau mais la seule différence est qu’il
n’y a pas d’après, il n’y a pas de monde idéal. Le monde idéal, il faut le construire
ici sur terre et pour cela nous citoyens d’un petit territoire où ils n'ont rien
demandé et rien fait sont obligés à se dénigrer.
Ce qui forme une nation ce n’est pas la
langue, ni la religion, ni la race mais le fait de vouloir tous ensemble
continuer à former cette nation. Nous avons un passé et nous construisons tous
ensemble le futur. L’héritage est quelque chose qu’on ne choisit pas. Mais il
faut l’accepter.
Et si le plus important c’était cela ?
Que chaque pays, chaque nation continue à bâtir son futur en acceptant son
passé et en acceptant le contexte de cet héritage ?
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